Charles a beaucoup œuvré dans le domaine de la moto durant toute sa carrière qui a duré plus de 50 ans (et ce n’est pas fini!). Comme pilote, responsable de département et surtout comme chef d’entreprise à la tête de Motos Daytona Inc., qui regroupait Moto Internationale, Harley-Davidson Montréal et BMW Motorrad, pendant près de 15 ans.
Il est issu d’une famille qui a vécu pour la passion des deux roues motorisées, comme son père Raymond ou son frère Richard. Son grand-père Charlie était un musicien qui jouait pour plusieurs formations montréalaises. Il était réputé pour déplacer sa batterie à l’aide de son side-car. Il a insufflé la passion à son fils Raymond qui a créé des concessions de moto, organisé des courses internationales et fondé le fameux Moto Club du Saguenay. Son frère Richard s’est fait connaitre en organisant le célèbre Show Harley de Montréal.
Charles est né à Chicoutimi au début des années soixante. Son grand-père Charlie était parti de Montréal pour le Saguenay–Lac-Saint-Jean, car il était représentant de Caterpillar pour le nord-est. Puis Raymond, son père, avait ouvert une concession moto à Chicoutimi. Dès l’âge de 6 ans, le petit Charles enfourchait sa première moto, une petite Indian Minicross sur laquelle il roulait dans la cour arrière familiale. La piqûre était prise!
C’est vers l’âge de 10 ans qu’il commençait les compétitions en motocross, puis rapidement en enduro, sans oublier le hill climbing ou le trial. L’hiver il courait en motoneige. Il rendait des services au magasin, pour remercier le commanditaire principal, son père, et par plaisir aussi de participer à la bonne marche du magasin, des valeurs de travail inculquées tôt.
Charles complétait son secondaire 5, et s’inscrivait au cégep. Mais l’appel de la concession familiale était le plus fort. Il commençait à travailler aux pièces, au service dans le magasin de Chicoutimi.
Raymond savait récompenser son fils quand il rentrait de compétition. Il était là, tard le soir, après les longues heures de route, pour connaitre le résultat de la journée. Une bonne place aux courses l’autorisait à rentrer un peu plus tard au travail le lendemain.
L’esprit compétitif était très développé chez Charles, et avec ou sans récompense paternelle, il a remporté près de 200 trophées ainsi que plusieurs titres provinciaux ou nationaux, en trial, motocross, enduro, drag et en motoneige. Un de ses plus beaux trophées lui a été remis en 1976 et 1977 pour une compétition de trial à Montréal, le même trophée qu’avait gagné son grand-père Charles en 1950!
Raymond, natif de Montréal, choisissait de retourner dans la métropole en 1979 pour améliorer les affaires et bénéficier d’un bassin de clients plus important.
Cette même année, après 14 fractures et des étagères remplies de trophées, Charles décidait d’arrêter la compétition pour se consacrer aux affaires familiales. Il prenait du galon et des responsabilités, il était responsable du service pièces et accessoires.
Harley-Davidson Montréal était ouvert sur la rue Sainte-Catherine. Les résultats étaient au rendez-vous. Il avait également la responsabilité de la gestion de la marque Suzuki au sein de l’établissement.
Alors Ray s’associait à Jack Hebert, propriétaire de Moto Daytona. Ils géraient le bâtiment de quatre étages sur la rue Sanguinet et réussissaient l’exploit d’obtenir les concessions des quatre marques japonaises, ainsi que Harley et BMW.
D’un petit magasin à Chicoutimi, l’affaire était passée au stade international, avec sept marques, une centaine d’employés à gérer. Le nom Moto Internationale apparaissait en 1984.
Charles gravissait un à un tous les échelons de l’entreprise. Il se formait aux produits et obtenait plusieurs diplômes des universités Harley-Davidson et BMW.
En 1983, les concessions s’installaient rue Saint-Jacques, lieu actuel du commerce.
Peu de temps après leur déménagement, le bâtiment de la rue Sanguinet passait au feu et faisait la une de l’actualité. C’était une publicité indirecte et imprévue pour annoncer le nouvel emplacement!
Il devenait copropriétaire de Moto Internationale et accédait à la vice-présidence, puis à la présidence de la société en 2004.
En 2005, une décision importante était prise. Seule les marques Harley-Davidson et BMW étaient conservées. L’objectif était d’améliorer le service client et la connaissance du produit. Il rappelle ce que disait son père Raymond aux clients : Ton problème, c’est mon problème.
En 2006, Charles prenait une initiative financière importante. Un investissement de 3 M$ pour créer les divisions Harley-Davidson Montréal et BMW Motorrad Montréal, côte à côte, mais avec une entrée séparée et un univers propre à chaque marque.
Il était alors président-directeur général de Motos Daytona Inc., qui regroupait Moto Internationale, Harley-Davidson Montréal et BMW Motorrad Montréal.
Il s’entourait des meilleurs employés, n’hésitant pas à rechercher en France des spécialistes BMW pour apporter un meilleur service sur cette marque émergente. Du côté de Harley-Davidson, il faisait de même, et il rappelle que le Fat Boy Harley a été conçu à Montréal par HD Montréal.
De son côté, il s’est investi dans la marque BMW. Il a même profité de ses vacances pour effectuer un stage hors route organisé par la marque en Allemagne. Il en est revenu transformé. Convaincu de l’intérêt de se former pour améliorer sa conduite et porteur d’une méthode pour enseigner à prendre en main ces imposantes machines destinées à l’aventure.
Il a enseigné de façon informelle à quelques amis et clients BMWistes. Ceux-ci étaient enchantés des résultats. C’était le début d’une autre aventure, la formation et les événements hors route.
C’était le premier Canadien à obtenir trois diplômes d’instructeur certifié par BMW Motorrad Munich en Allemagne (hors route, route et performances hors route). Il a créé l’école de perfectionnement moto Sécurité Active et il est devenu le chef instructeur. C’est juste une activité supplémentaire à son rôle de président. Dans la famille Gref, la vente de moto s’accompagne de la promotion de la marque et de la pratique.
Il a été le deuxième au monde à organiser un GS Challenge en 2007, avant les Allemands! Il l’a organisé tous les deux ans jusqu’en 2017. En 2014, il a été sélectionné pour être marshal au GS Trophy International, ce qui l’a amené à parcourir 4 800 km en sept jours! En 2010, il a participé au GS Challenge Germany.
Quand je lui demande quels restaurants et quelles routes il préfère, il répond : Pour les restaurants, j’adore les petits casse-croûtes qu’on trouve au bord des routes. J’observe le nombre de véhicules sur le stationnement pour prévoir si c’est bon! À Chicoutimi, il aime le restaurant steack house Chez Georges, rue Racine.
Je n’ai pas de routes préférées au Québec, j’aime les routes des Laurentides, vers Saint-Sauveur autant que celles des lignes américaines. J’aime rouler en BMW R 1250 GSA Rallye (ma préférée, avec une autonomie d’essence supérieure) même sur l’asphalte. C’est plus confortable qu’on ne pense, et c’est bien adapté aux routes d’ici. Mais je me rends compte que j’ai beaucoup roulé dans les Alpes européennes, et c’est vraiment magnifique, avec des routes très bien entretenues et des paysages somptueux.
En effet, Charles a été très proche de la maison mère de BMW à Munich. Il a fait partie de ceux qui ont donné leur avis sur les évolutions à prévoir pour le développement de la marque. Il a eu son mot à dire pour la BMW R18, par exemple. Le défi des marques comme BMW et Harley-Davidson, c’est de rejoindre une nouvelle clientèle plus jeune, avec un budget moins important. La moto d’aventure est un bon marché. BMW est sur un momentum incroyable. Harley-Davidson doit travailler à modifier son image, baisser un peu ses prix pour y arriver. L’avenir de la moto est aussi dans les petites motos pas chères pour se déplacer.
La question sur toutes les lèvres est posée pour vous : pourquoi avoir vendu Moto Internationale? Nous avons été approchés par un professionnel des ventes d’entreprises et ses arguments était censés. Du côté familial, il n’y avait personne à qui transmettre l’entreprise. Mon fils fait des études brillantes de finances à HEC et il ne souhaitait pas s’investir dans le milieu d’affaires de la moto. C’est son choix. Il faut reconnaitre que cela représente de longues heures de travail et de présence pour diriger une concession. L’agent a bien fait son travail et nous a présenté au moins quatre propositions. Nous proposions une belle entreprise qui dans ses meilleures saisons réalisait un chiffre d’affaires supérieur à 33 M$, vendait plus de 2 700 motos et employait une centaine d’employés annuellement!
Le Groupe Automobile Gabriel nous a fait une belle offre et nous avons eu des garanties aussi concernant nos employés. Nous avons signé en novembre 2018 et je suis resté pour faire la transition jusqu’à la fin de l’année.
Depuis, Charles Gref a agi comme ambassadeur de BMW Motorrad Canada dans les salons et autres événements. L’école de perfectionnement Sécurité Active est restée avec le groupe Moto Gabriel. Charles a terminé en 2018 avec l’école, mais il y a beaucoup à faire en matière de formation et d’événement au Canada. Il peut donner des cours individuels ou collectifs dès que le fameux virus aura perdu de son intensité
Charles Gref propose également son expérience à d’autres concessionnaires en tant que consultant.
Pour qu’un commerce de moto fonctionne, il faut passer beaucoup d’heures, et organiser des événements, aider les clubs. Nous sommes à l’origine du lancement du HOG et du BMW Club de Montréal, par exemple, sans parler des nouvelles techniques de vente sur internet.
Pour finir cette entrevue, Charles Gref insiste sur l’importance de la formation moto, route et hors route. Il rappelle que le trial est aussi une très bonne base pour apprendre les fondamentaux de l’équilibre et de la position en moto. Plusieurs clients abandonnent la moto puis reviennent aux deux-roues. Il est important de suivre un cours au retour. Combien de personnes ne connaissent pas le contrebraquage, le freinage d’urgence?
Un jour, un ancien élève lui a écrit : Le cours que j’ai suivi m’a sauvé la vie.
Autant que la centaine d’emplois qu’il a créés, les résultats financiers, la satisfaction des clients fidèles, la certitude d’avoir sauvé des vies par la formation est une des grandes récompenses de la vie professionnelle et associative de Charles Gref.